Les huiles de graines causent-elles des maladies chroniques ?
Dernière mise à jour : 18 August 2025
Les huiles de graines sont extraites des graines de diverses plantes. Tu les connais sûrement : colza (ou canola), maïs, coton, pépin de raisin, soja, tournesol, carthame et son de riz. Elles sont abordables, ont un point de fumée élevé (ce qui signifie qu’elles restent stables à haute température et conviennent donc bien pour la cuisson) et sont riches en vitamines E et K.
Alors, pourquoi voit-on tant de personnes sur les réseaux sociaux affirmer que les huiles de graines sont responsables de l’augmentation des maladies chroniques, comme les maladies cardiovasculaires et le diabète de type 2 ? Déconstruisons ce mythe.
Consommer des huiles de graines est-il mauvais pour la santé ?
Non, consommer des huiles de graines n’est pas mauvais pour la santé. Leur consommation a certes augmenté ces dernières décennies, et certains affirment que cette hausse coïncide avec l’augmentation des maladies chroniques, en concluant que les huiles de graines en sont la cause. Mais corrélation ne signifie pas causalité ! Ce raisonnement ignore d’autres facteurs pouvant influencer notre risque de maladie.
Les huiles de graines sont souvent présentes dans des aliments comme les snacks salés emballés, les pâtisseries, les gâteaux et les frites. Ces produits sont également riches en sel et en sucre, des ingrédients dont la consommation excessive est associée à un risque accru de maladies chroniques. Par ailleurs, notre mode de vie est devenu plus sédentaire, ce qui contribue aussi à l’augmentation de ces maladies. Bref, ce n’est pas parce que la consommation d’huiles de graines augmente en même temps que les maladies chroniques que l’une est responsable de l’autre.
Les recherches montrent qu’une consommation plus élevée d’acides gras oméga-6, un bon indicateur de la consommation d’huiles de graines, est associée à une réduction du risque cardiovasculaire, aussi bien dans des études d’intervention que dans des études observationnelles, ce qui renforce la fiabilité des résultats.1-4 Les acides gras polyinsaturés (AGPI) oméga-6 contribuent, par exemple, à la réduction du cholestérol LDL, un facteur de risque connu des maladies cardiovasculaires. L’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) confirme d’ailleurs que "l’acide linoléique contribue au maintien d’un taux normal de cholestérol dans le sang".5
Cet effet bénéfique est obtenu avec une consommation quotidienne de 10 g d’acide linoléique, ce qui correspond à environ 1,5 cuillère à soupe d’huile de tournesol ou de soja, ou à environ 3,5 cuillères à soupe d’huile de colza.6 Cela représente environ 8 %, 9 % et 23 % des calories quotidiennes (pour un régime de 2 000 kcal), respectivement.
Un apport plus élevé en AGPI oméga-6, et en particulier en acide linoléique, améliore également le contrôle de la glycémie à long terme et la sensibilité à l’insuline, des facteurs clés dans le développement et la gestion du diabète de type 2.1,7
Pourquoi les huiles de graines ne sont-elles pas mauvaises pour la santé ?
Les études qui prétendent que les huiles de graines augmentent le risque de maladies chroniques présentent des limites méthodologiques qui affaiblissent leurs conclusions.
Par exemple, l’étude Sydney Diet-Heart, menée dans les années 60, a observé que les hommes qui augmentaient leur consommation d’oméga-6 via les huiles de graines avaient un risque cardiovasculaire plus élevé.8 Mais un détail crucial est souvent ignoré : à cette époque, une grande partie de l’huile de graines était consommée sous forme de margarine contenant des graisses trans, connues aujourd’hui pour augmenter le risque de maladies (et qui ont été largement supprimées des produits alimentaires en Europe). Il est donc probable que ce soit la présence de graisses trans, et non les huiles de graines elles-mêmes, qui ait causé ce risque accru. En outre, l’étude comportait trop peu de participants, une durée trop courte et d’autres facteurs de confusion qui affaiblissent la qualité des résultats.
Un problème similaire s’est posé avec l’expérience Minnesota Coronary, qui comparait une alimentation riche en AGPI à une alimentation riche en graisses saturées pour évaluer leur impact sur les maladies coronariennes.9 Cependant, les participants n’ont pas suivi strictement les régimes assignés et les résultats obtenus n’étaient pas statistiquement significatifs, ce qui signifie qu’aucune différence réelle n’a été observée entre les deux groupes.
Une autre étude souvent citée pour discréditer les huiles de graines est l’essai Rose Corn Oil, qui comparait un groupe consommant de l’huile de maïs et de l’huile d’olive à un groupe témoin conservant son alimentation habituelle.10 Avec seulement 26 participants par groupe, cette étude est bien trop petite pour être considérée comme une preuve solide. De plus, la présence de graisses trans complique encore l’interprétation des résultats.
La plupart des recommandations alimentaires et organismes de santé internationaux et européens, comme l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Société européenne de cardiologie, conseillent que moins de 10 % de l’apport énergétique total quotidien provienne des graisses saturées (présentes dans le beurre, l’huile de palme et l’huile de coco) afin de réduire le risque de maladies chroniques. Pour y parvenir, ces graisses saturées doivent être remplacées par des graisses insaturées, en particulier les acides gras polyinsaturés présents dans les huiles de soja, colza (canola), maïs, carthame et tournesol.11,12
À retenir
- Les graisses contenues dans les huiles de graines, y compris les AGPI oméga-6, sont essentielles pour la santé, et il n’existe aucune preuve solide qu’elles provoquent des maladies chroniques.
- Corrélation ne signifie pas causalité. L’augmentation des maladies chroniques coïncide avec une consommation plus élevée d’huiles de graines, mais cela ne signifie pas que les huiles en sont responsables. D’autres facteurs, comme la sédentarité et une alimentation riche en graisses saturées, sel et sucre, jouent également un rôle majeur.
- Avant de vouloir bannir totalement les huiles de graines, il est important d’analyser l’aliment dans son ensemble. Beaucoup de produits contenant ces huiles sont aussi riches en sel et en sucre, des ingrédients qu’il est effectivement préférable de limiter.
- Les huiles de graines peuvent réduire le cholestérol LDL, un facteur clé des maladies cardiovasculaires, et sont associées à un meilleur contrôle de la glycémie et une réduction de la résistance à l’insuline, deux éléments essentiels pour prévenir et gérer le diabète de type 2.
- Les maladies chroniques sont influencées par plusieurs facteurs, notamment génétiques, physiologiques, environnementaux et comportementaux. En agissant sur les quatre principaux facteurs de risque modifiables (alimentation déséquilibrée, sédentarité, tabagisme et consommation d’alcool), on peut considérablement réduire le risque de maladies chroniques.
- L’EFSA recommande que 4 % au moins de l’apport calorique quotidien provienne des graisses oméga-6. À ce jour, il n’existe aucune preuve solide indiquant que leur consommation est nocive ou liée à des maladies.13
Cet article fait partie d’une série sur les mythes autour des huiles de graines :
Les huiles de graines provoquent-elles de l’inflammation ?
La transformation des huiles de graines est-elle un danger pour la santé ?
Les huiles de graines favorisent-elles le stress oxydatif ?
Les références
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- Sacks FM, Lichtenstein AH, Wu JH, Appel LJ, Creager MA, Kris-Etherton PM, et al. (2017). Dietary fats and cardiovascular disease: a presidential advisory from the American Heart Association. Circulation 136(3):e1-e23.
- Marklund M, Wu JH, Imamura F, Del Gobbo LC, Fretts A, De Goede J, et al.; Cohorts for Heart and Aging Research in Genomic Epidemiology (CHARGE) Fatty Acids and Outcomes Research Consortium (FORCE). (2019). Biomarkers of dietary omega-6 fatty acids and i
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- Ramsden CE, Zamora D, Faurot K, Majchrzak S, Hibbeln J. (2013). The Sydney Diet Heart Study: A randomized controlled trial of linoleic acid for secondary prevention of coronary heart disease and death.
- Ramsden CE, Zamora D, Majchrzak-Hong S, Faurot KR, Broste SK, Frantz RP, et al. (2016). Re-evaluation of the traditional diet-heart hypothesis: Analysis of recovered data from Minnesota Coronary Experiment (1968-73). BMJ 353:i1246.
- Rose GA, Thomson WB, Williams RT. (1965). Corn oil in treatment of ischaemic heart disease. British Medical Journal 1(5449):1531–1533. https://doi.org/10.1136/bmj.1.5449.1531
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- Piepoli, Massimo F., et al. "2016 European Guidelines on cardiovascular disease prevention in clinical practice: The Sixth Joint Task Force of the European Society of Cardiology and Other Societies on Cardiovascular Disease Prevention in Clinical Pract
- European Food Safety Authority (EFSA). (2017). Dietary reference values for nutrients summary report. EFSA Journal 14(12):e15121E.